Septembre 2022︎︎︎︎︎︎

✶ Première ébauche pour la conception d’une œuvre in situ

27 septembre 2022 





Terrains urbains

20 septembre 2022

À la base d’une recherche sur l’écologie du son se pose la question du milieu, puisque chaque environnement entraînement nécessairement en enchevêtrement de caractéristiques et de relations distinctives. Dans l’optique d’une démarche de création in situ, il est nécessaire de se questionner sur le choix du terrain de recherche-création, sans oublier que cette réflexion fait déjà partie du projet de composition.

Pour cette première œuvre, j’ai choisi d’investir un lieu en zone urbaine, d’abord par souci de proximité d’avec mes propres milieux, communauté et style de vie, et en raison de la relation particulière qui relie nature et culture dans la ville.

Mais quel lieu pourra accueillir la recherche et la création ? Quelles en seront les caractéristiques ? Les sonorités ? Quelle communauté l’habitera ?

Comme premier exercice, j’émets ici l’hypothèse de certains archétypes urbains de milieu de recherche en tentant de les caractériser.
  • La zone revitalisée :

La zone revitalisée correspond à un espace d’abord laissé à l’abandon, puis réinvesti par un urbanisme contemporain et souvent lié aux besoins de la communauté (sports, loisirs, arts, culture, détente).

Exemples : Parc linéaire du Réseau-Vert (ainsi que le Skatepark Van Horne et l’Entrepôt 77), la Plage urbaine de Verdun ou le futur Parc des Gorilles.

- Aménagement contemporain, propre, durable, innovant
- Signe d’une certaine gentrification
- Vivant, dynamique, habité par une vie culturelle organisée
- Ambiance sonore de la socialisation (musique, conversations, circulation)
- Communauté locale, touristique, artistique, et travailleurs·euses
  • Le parc ou le jardin :

Espace public circonscrit et séparé de la vie urbaine, aménagé de façon à reproduire un paysage naturel destiné à la contemplation. Lieu de détente et de récréation. La nature y est inscrite de façon artificielle ou planifiée. L’interaction avec l’environnement suit le plan d’un aménagement, le parcours des sentiers et l’abord des bosquets.

Exemples : le Jardin Botanique, le parc du Mont-Royal, leParc-nature de l'Île-de-la-Visitation.

- Nature balisées et protégées
- Pause ou rutpure d’avec le rythme de la vie urbaine
- Ambiance sonore calme, plus naturelle
- Communauté locale
  • Le secteur industriel :

Éloigné des espaces de vie, le secteur industriel évoque une concentration de bâtiments ouvriers, spacieux, massifs et habités par une machinerie imposante. Son cycle est régulé par le rythme du travail. La faune et la flore y sont majoritairement absentes.

Exemples : le Secteur industriel de la Pointe-de-l’Île, le Port de Montréal, les environs du bassin Peel.

- Nature quasiment absente en dehors d’une faune et d’une flore sauvage
- Évoque la saleté, la pollution, les débris
- Rythme du travail, des machines, du transport de marchandise
- Ambiance sonore bruyante, agressive, machinale
- Communauté de travailleurs·euses, d’ouvriers·ères, de passage par nécessité
  • Le terrain vague :

Espace souvent cloisonné, propriété privée ou municipale dont l’accès est restreint ou interdit. On y trouve les traces ou les ruines d’une ancienne occupation et de la désertion, ou celles des traversées clandestines. Terrain d’un potentiel, d’une mise en attente.

Exemples : terrain vague de la Cité de la mode, le Parc des Possibles, le Jardin du Crépuscule, la carrière Francon.

- La nature reprend graduelle le dessus sur les ruines
- Calme plat, en dehors de la vie urbaine
- Géographie marquée par d’anciennes occupations
- Ambiance sonore de l’isolation, de la désertion, de l’éloignement
- Communauté absente, clandestine, ou qui observe à distance
  • Le centre urbain :

Au cœur de la ville, le centre urbain abonde en commerces, en services et en loisirs. La vie humaine y occupe toute place et s’articule à un rythme rapide, constant.

Exemple : le centre-ville de Montréal

- La nature quasi absente, qui apparaît sous forme décorative
- Rythme rapide de la vie urbaine, du travail, de la consommation, de la circulation
- Géographie à échelle humaine et architecturale
- Ambiance sonore urbaine, surtout marquée par la circulation automobile
- Communauté diversifié, internationale, touristique, d’affaire, de passants
  • Le pôle culturel :

Lieu dynamique rattaché au centre urbain, mais où la place est réservée au spectacle et aux rencontres artistiques. Un plus grand espace est laissé à la contemplation, aux rencontres, à la déambulation et à la découverte. La nature s’y inscrit à fins décoratives.

Exemple : la Place des Arts

- Aménagement de la nature dans un but d’enjoliver
- Monde des arts et du spectacle
- Ambiance sonore urbaine, musicale, festivalière
- Communauté diversifié, internationale, touristique, artistique



Pistes de réflexion pour une première œuvre

13 septembre 2022
Choix d’un lieu significatif au cœur d’un espace urbain :

  • En raison d’une problématique environnementale ?
  • Une géographie ou un lien particulier à la nature ?
  • Un reflet de nos relations à la nature en milieu urbain ?


Approfondir mon sujet de recherche :

  • Quelques lectures en lien avec la thématique de l’œuvre pour nourrir la composition et la documentation
  • Séminaire Cultures, natures, savoirs


Trouver des collaborateurs·rices :

  • Collaborer avec d’autres disciplines artistiques afin de sonder le terrain et pour inclure dans la création
  • Recherche scientifique, partage de connaissances sur l’écologie du lieu
  • Entamer un exercice de création collaboratif ou communautaire


Développer des méthodes et des outils inspirés de l’écologie et l’environnement :

  • Conceptualiser un environnement de composition écosystémique (programmation)
  • Employer l’analyse de données, potentiellement recueillies sur le terrain
  • Concevoir des processus interactifs (avec l’environnement, avec les collaborateurs·rices, avec la communauté et le public)


Sonder le lieu de création :

  • Documentation multimédia et recherche de matériaux sonores
  • Recherche quant au positionnement culturel et naturel du lieu
  • Exercices de création in situ, incluant les collaborateurs·rices

Composition de l’œuvre :

  • Mettre en place les divers éléments de la recherche pour composer une œuvre musicale
  • Forme hybride événementielle, expérientielle, non linéaire, interactive, communautaire, collaborative, relationnelle, situationnelle...
  • Événement public


Journal de bord — dévoiler le processus créatif, révéler une multiplicité de perspectives :

  • Employer divers récits, divers médiums
  • Médiation entre diverses formes, diverses voix
  • Rendre le processus créatif accessible, reproduisible dans la vie quotidienne
  • Conscientiser le public à l’environnement, principalement à travers le son
  • Tisser des liens entre le son et l’environnement par l’entremise d’une pluralité de médiums



➣ Inspirations

« Le progrès, ce n’est pas de faire éclore des routes dans des paysages déjà merveilleux, mais de faire éclore la réceptivité dans des cerveaux humains qui ne le sont pas encore. » (Leopold, 1949, trad. 2000)

« Car ce qu’on appelle la “nature” n’est pas d’abord ce système autonome postulé par le savoir philosophique ou scientifique, mais cette puissance qui, s’actualisant à travers une multiplicité de corps, se déploie incessamment comme ouverture et mouvement illimité, c’est-à-dire comme naturer. » (Bartolie et Gosselin, 2019)

« Avoir l’attitude de l’artiste suppose inventer d’autres modes de vie possibles. » (Pardo Salgado, 2017)

« Il s’agit de commencer à s’arrêter de penser le sonore en tant qu’objet ou matière, et de le penser plutôt en tant que milieu d’événements transitoires et situés, et plus particulièrement comme milieu “de relation” ». (Di Scipio, 2017)

« En s’orientant vers le champ des déterminations sonores, la pensée musicale se place au niveau de l’événementialité du son : autrement dit, l’écriture du “sonore”, sous la diversité de ses angles, fait partie intégrante de l’écriture musicale, du stade initial des conditions de l’émission du son aux régimes d’énergie qui l’entretiennent, de sa projection, sa diffusion et sa propagation, jusqu’à la conception de sa réception dans un espace acoustique. » (Criton, 2016)

« La plupart des pratiques créatives portant sur l’expérience du son comme événement ne se traduisent pas dans des objets techniquement reproductibles. Dans cette perspective, les façons de présenter ainsi que les moyens de mise en présence sont plus importants que les manières de représenter. » (Di Scipio, 2016)

« Ainsi, “l’écologie sonore” serait l’étude des rapports entre les êtres vivants et le milieu sonore, mais pourrait aussi véhiculer l’idée d’un équilibre à trouver entre l’homme et son environnement sonore par la protection de ce milieu. » (Bonnet et Pelé, 2016)

« Une musique écologique est une musique qui permet d’habiter le monde en sa totalité. Cela implique d’atteindre la complexité en s’éloignant du désir de céder à une fragmentation qui simplifie le monde pour mieux l’expliquer. S’il s’agit d’habiter le processus qu’est le monde, il n’est pas possible de l’encadrer par des petites parties qui offrent un sens unique. Il faut porter l’attention à la polyphonie du monde. » (Pardo Salgado, 2016)

« And in the air we find ourselves together, and in doing so we can account implicitly for the more conceptual and historic locations for audio’s potency. Air is the material for the composition of a commons. Audio is an ephemeral social architecture made of air. » (Silver, 2014)

« L’écoute consiste en la co-création d’un sujet (l’intention de l’auditeur) et d’un objet (l’œuvre musicale, le son) – sujet et objet étant à prendre dans leur acception phénoménologique. Elle est également située et élabore son autonomie dans son interaction avec un environnement. Il y a donc trois éléments : le sujet, l’objet et ce que l’on pourrait appeler le milieu (sonore). » (Solomos, 2018)

« Sound is not only of the human, it undermines human exceptionalism; everything vibrates on some frequency and is touched by vibration, regardless of how imperceptible to human sensibility this might be. » (Kanngieser, 2015)

« ... il s'agit, à chaque fois, de se pencher sur ce que pourraient être des dispositifs de production de subjectivité allant dans le sens d'une re-singularisation individuelle etlou collective, plutôt que dans celui d'un usinage mass-médiatique synonyme de détresse et de désespoir. » (Guattari, 1989)






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